Environnement

La tourbière de Montifray, un petit conservatoire

Chacun des espaces naturels sensibles (ENS) d’Indre-et-Loire est un véritable écrin abritant une biodiversité précieuse. Les tourbières le sont à plus forte raison, malgré leur aspect moins boisé que d'autres sites. Paradoxalement, c’est, entre autres particularités, la pauvreté de leur sol qui fait leur richesse biologique...

Zone particulièrement humide, la tourbière de Montifray, située dans la vallée de Vandoeuvre, sur la commune de Beaumont-Louestault, à 35 km au nord de Tours, présente plusieurs buttes tourbeuses, ou « bombements ». Le site est alimenté par une nappe souterraine, selon un mécanisme naturel appelé arthésianisme, grâce auquel l’eau remonte en empruntant les fissures du calcaire, ainsi que grâce aux végétaux, surtout des mousses, qui pompent l’eau et la font ainsi remonter jusqu’au sommet des buttes, résultat de l’accumulation de la tourbe et de l’eau sous le couvert végétal. Ces bombements peuvent parfois, très longtemps après, finir par se tasser, quand ils deviennent trop hauts, et rendent ainsi l’eau souterraine inaccessible aux plantes.

Mouron délicat et Agrion de Mercure

Mais nous n’en sommes pas encore là sur la tourbière de Montifray, dont la hauteur se maintient. La faune et la flore, aux noms qui laissent rêveurs, peuvent encore pour longtemps profiter de ce milieu des plus privilégiés. L’Epipactis des marais s’y épanouit, comme la Laîche puce, et celle à beaux fruits, le Mouron délicat, le Cirse anglais, ou encore l’Orchis élevé, considéré comme en danger critique d’extinction. Car ces espèces sont fragiles, et plus de la moitié de la quinzaine d’espèces recensées sur la tourbière, est, à des degrés divers, vulnérable ou menacée et fait l’objet de protection. Au milieu de cette flore évoluent oiseaux, amphibiens, reptiles et insectes, tels que dix-sept espèces de libellules, comme l’ Agrion nain ou l’Agrion de Mercure, trente-et-une espèces de papillons de jour, parmi lesquels le Cuivré des marais. On y trouve aussi l'Écrevisse à tête blanche, qui se cache dans les racines émergées des saules et des aulnes, et qui subit la concurrence de l’envahissante Ecrevisse de Louisiane. Les criquets et les sauterelles y abondent également, représentés par dix espèces différentes. Une faune qui nécessite, elle aussi, une protection pour plusieurs des espèces qui la composent.

Un entretien régulier

Tout un écosystème, un petit monde, qui nécessite une attention particulière pour sa préservation. Le Conseil Départemental en a confié le pâturage à un éleveur dont les brebis nettoient le site des plantes surnuméraires entre septembre et mars, pour épargner celles qui font la typicité du lieu. Par ailleurs, une fauche automnale, réalisée par une entreprise d’insertion, permet elle aussi de conserver un équilibre, empêchant un assèchement du sol et son enrichissement, qui porteraient préjudice aux espèces typiques du site, telles que les orchidées, qui affectionnent les sols pauvres. C’est ainsi que l’on voit désormais réapparaître sur la tourbière des touffes de Choin noirâtre, qui avait disparu jusqu’alors !

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