Violent, rusé, perfide, sans scrupules, cruel... et pourtant miséricordieux, pieux, pour ne pas dire dévot, mari fidèle, affectueux envers ses serviteurs, doué d’une intelligence remarquable, d’un sens politique hors du commun : Louis XI (1423-1483), longtemps brocardé par les historiens et les intellectuels – Voltaire, entre autres – avant de bénéficier d’un retour en grâce, est un personnage fascinant.

Chétif d’apparence, selon le pamphlétaire contemporain Basin, assez gros, avec des jambes grêles, laid et sans noblesse (n’en jetez plus !), c’est, au-delà d’un physique sans majesté – tout le monde ne peut pas être François I^er –, le roi centralisateur et modernisateur que l’on veut voir aujourd’hui. Qualité supplémentaire : il fut sans conteste le plus tourangeau de nos souverains.

Ainsi, dès 1425, tout jeune donc, il est envoyé dans la forteresse de Loches, sous la garde de Catherine de l’Isle-Bouchard, afin d’y grandir à l’écart des meurtres et de la corruption qui sévissent à la Cour de Bourges ; il y demeure jusqu’en 1433, année où il rejoint sa mère à Amboise.

À travers la Touraine

De retour du Brabant, terre d’accueil après le Dauphiné où son père l’avait exilé pour cause d’hostilité vis-à-vis de la favorite Agnès Sorel, le nouveau roi, couronné le 15 août 1461 à Reims, fait son entrée solennelle à Tours le 8 octobre de la même année. Tours, qu’il choisit comme capitale, et à proximité de laquelle il réside, un peu à l’écart du bruit et de l’agitation urbaine, dans ce château des Montils qu’il rebaptise Le Plessis. « Le roi aime trop le grand air et la chasse, et surtout il est trop méfiant, pour ne pas vouloir vivre hors les murs, dans son propre château », écrit Bernard Chevalier dans Tours, ville royale (CLD). C’est donc là que le roi décide de fixer sa Cour, entre Bretagne et Bourgogne (terres de deux vassaux agités, c’est le moins que l’on puisse dire), et à distance de Paris, ville rebelle et turbulente. Il y mourra le 30 août 1483.

Maître d’ouvrage du château de Jallanges, à Vernou-sur-Brenne, grand chasseur dans la « Basse Forêt » de Chinon ou les forêts giboyeuses proches de Langeais, navigateur sur la Loire, dans une galiote, hôte des ambassadeurs flamands à Château-Renault : on retrouve Louis XI dans toute la Touraine. Mais revenons à Loches, ville chère au cœur du souverain : en cette année marquant le 600^e anniversaire de sa naissance, il y sera particulièrement à l’honneur.

L’Histoire en dessins

Dans ce lieu historique, un parcours thématique est mis en place depuis le 8 avril (jusqu’au 5 novembre) afin d’illustrer les moments-clés de la vie du dauphin qu’il fut et du roi qu’il devint. « Illustrer » est le mot qui convient : « Nous avons missionné Patrick Dallanegra qui a réalisé toute une série de dessins originaux sur les thèmes que nous déclinons d’un espace à l’autre des deux monuments (logis royal et donjon), explique Jean-François Thull, directeur de la Cité royale de Loches. Chacun de ces espaces que nous avons déterminés en fonction de leur cohérence avec le thème présenté est illustré de façon très concrète. Par exemple, pour évoquer l’éducation du Dauphin, nous voyons ce dernier en train d’écrire à sa table d’écolier, avec à ses côtés son précepteur, et plus loin Charles VII qui regarde attentivement son fils aîné – la relation, souvent conflictuelle, entre eux deux est d’ailleurs l’un des fils conducteurs de ce parcours. » Le futur souverain est aussi dessiné en présence de Jeanne d’Arc, venue à Loches en 1429 ; hypothèse tout à fait vraisemblable. D’ailleurs, l’ensemble du parcours qui comprend, hormis des dessins, des textes explicatifs, s’appuie sur des travaux sérieux, quitte à mettre à mal les légendes autour de Louis XI, qu’il s’agisse de la noire ou de la dorée.

Précisons que chaque élément de texte comprend une cartouche destinée au jeune public, avec une question. Par exemple : Pourquoi le fils de Charles VII a-t-il été baptisé Louis ? La réponse est à Loches !

Un monarque à facettes

La jeunesse d’un roi, au niveau du logis (où nous pouvons voir les dessins de travail de Patrick Dallanégra), n’est pas le seul thème présenté dans la Cité royale : au niveau du donjon, nous apprenons, à travers textes et illustrations, les raisons pour lesquelles Louis XI a été qualifié de roi stratège, de roi bâtisseur – il a notamment parachevé la mise en défense de la forteresse de Loches –, ou encore de roi geôlier (les fameuses cages de fer et fillettes !). « Nous concluons ce parcours avec la question de la postérité de l’image de Louis XI, poursuit Jean-François Thull. Roi-tyran pour les uns, qui a écrasé d’impôts ses sujets et qui a été contesté par les princes territoriaux, il a aussi conforté l’autorité du pouvoir royal. D’autres chroniqueurs lui rendent hommage. Il y a eu une redécouverte de son œuvre unificatrice au XIX^e siècle, plutôt favorable. » Il s’agit donc d’être objectif devant cette figure de l’Histoire de France, plus crainte qu’aimée, mais riche d’un bilan incontestable, fondé sur l’édification et le renforcement de l’État à une période charnière, entre Moyen-Âge et Renaissance.

 

Cité royale, 5 place Charles VII, 37600 Loches

02 47 19 18 08 - citeroyaleloches.fr

 

À noter :

Visites guidées thématiques Louis XI, du 8 avril au 18 juin et du 3 septembre au 15 octobre, 1^er dimanche du mois (logis) et 3^e dimanche du mois (donjon), à 11 h.

Dimanche 11 juin à 16 h ; conférence d’Amable Sablon du Corail, conservateur général du patrimoine, responsable du département du Moyen-Âge et de l’Ancien Régime aux Archives nationales, sur le thème : « Charles VII et Louis XI, ruptures et continuités. »

Dimanche 25 juin à 16 h ; conférence de Lydwine Scordia, docteur en histoire médiévale, maître de conférences (Histoire du Moyen-Âge) à l'Université de Rouen, sur le thème : « Variations historiographiques autour de Louis XI. »

Escape Game « Médiévade » sur le thème de Louis XI proposé dimanche 30 avril, dimanche 7 mai, samedi 20 mai et dimanche 28 mai de 14 h à 18 h, et, du 26 juillet au 13 août, tous les mercredis et dimanches de 14 h à 18 h.