Culture

Un modèle de joaillerie gauloise

De nos jours, il n’est pas difficile de trouver des pendentifs-cages en bonne place dans les bijouteries. Ce n’est pourtant pas une invention récente : ces jolis objets existaient déjà il y a plus de 2 000 ans. Une particularité gauloise ! Plusieurs exemplaires ont été mis au jour à Amboise.

L’objet archéologique du mois fait partie d’une série découverte à Amboise, sur le site de l’oppidum, de « pendentifs-cages », chacun étant constitué d’une bélière pour le suspendre et d’une forme en alliage cuivreux destinée à enserrer « une petite pierre, galet ou fragment de quartz, d’une dent d’animal, ou d’un fossile », précise Jean-Marie Laruaz, du Service de l’Archéologie du Département d’Indre-et-Loire (Sadil).

Treize objets de ce type ont été retrouvés sur l’oppidum d’Amboise en une vingtaine d’années. Une fréquence qui interroge sur la fonction de ces « pendentifs » ; un terme sous lequel ils sont habituellement désignés, ici ou ailleurs, certains exemplaires ayant été retrouvés sur d’autres sites occupés jadis par les Gaulois, en Auvergne, à Bordeaux, souvent dans le centre-ouest... Au total, 70 ont été exhumés. De différents modèles, plus ou moins élaborés, mais toujours métalliques et formés de leur bélière et de leur « cage », ou du moins d’une partie pouvant sertir la pierre ou autre.

Un objet très caractéristique de la fin de la période gauloise (IIe-Ier siècle av. J.-C.). Concernant spécifiquement « notre » pendentif, rappelons que l’antique Ambacia (Amboise) était alors la ville principale des Turons. C’est là qu’a été mise au jour la plus importante série de pendentifs-cages à l’échelle nationale. Il est vrai que le site, sous et derrière le château, a été le cadre de nombreuses fouilles – l’oppidum est sans doute l’une des villes gauloises les plus fouillées à l’échelle nationale. Si quelques pendentifs-cages ont été retrouvés en Touraine, ils ne l’ont pas été en aussi grand nombre qu’à Amboise.

Une mini-tour Eiffel

Le sertissement de la pierre induit un travail de bijouterie assez complexe, un vrai savoir-faire technique. Aucunement rudimentaire, donc. Mais la symbolique de la pierre, protégée dans sa cage, nous échappe encore. Le fait que les fragments de galet ou de quartz soient translucides se rapporte, peut-être, à la lumière. D’autant plus que le pendentif-cage rappelle une lanterne miniature ! Il évoque aussi une mini-tour Eiffel. Aucun lien évidemment (à moins que le célèbre ingénieur ne s’en soit inspiré), au détail près que le bijou, lorsqu’il se présente sous cette forme, est ainsi qualifié avec humour par les archéologues.

Un objet relativement rare, donc, qui invite à penser qu’il permettait de marquer le statut social, le sexe, l’âge de son propriétaire, certaines parures étant offertes lors du passage à l’âge adulte. En l’absence de sources écrites, cette découverte permet cependant d’entrer dans les usages culturels de la société gauloise. « Même si l’on ne sait pas exactement quelle était leur fonction primaire, rappelle Jean-Marie Laruaz, un certain nombre de ces objets a été retrouvé dans un contexte que l’on suppose être cultuel. Ils ont été déposés intentionnellement, après leur utilisation d’origine, avec d’autres objets complets, dans le cadre d’un rite. Ou dans des tombes, dans des sépultures de personnes privilégiés, enterrées avec un mobilier d’accompagnement qui témoigne de leur richesse. » Ce n’était pas le bijou de n’importe qui...

 

Référence

Boucher T., Laruaz, J.-M., Lusson D. (2023) – Les pendentifs-cages de la fin de l’âge du Fer en Gaule, revue Instrumentum, n°57, juin 2023, Musées de Chauvigny : 7-32.

 

Photo : Michaël Beigneux, Archives départementales d’Indre-et-Loire

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